Résumé :
De la jeunesse du plus cruel des Utroms au mystérieux séjour d’Oroku Saki au royaume des morts, en passant par l’éveil poignant d’Alopex et la lutte de Karai pour s’imposer au sein du clan Foot, les adversaires iconiques des fils de Splinter sortent de l’ombre pour dévoiler tour à tour une facette inédite de leur histoire.
Critique :
Lorsque la série Tortues Ninja a été relancée en 2011, les ramifications du scénario ont très vite apporté plusieurs ennemis principaux, alors pas forcément tous développés avec un bagage détaillé.
Dans les premières années de publication, des micro-séries (histoires en un seul numéro) ont été confiées à différentes équipes artistiques pour approfondir certains personnages importants, d'une part chez les Tortues et leurs alliés, et d'autre part chez leurs ennemis du moment. Ces micro-séries ont été compilées en VO dans un recueil regroupant les héros d'un côté et un autre regroupant les ennemis. Cette année, HiComics démarre la publication de ces micro-séries avec le premier recueil « Villains » comptant les 8 numéros dans lesquelles les Tortues se font très rares pour laisser toute la place à leurs adversaires.
Avis rapide sur chacun des numéros de ce volume.
Krang
Scénario : Joshua Williamson / Dessin : Mike Henderson
L'histoire est un récit flashback narré par un Krang ayant connu l'échec face aux Tortues, se remémorant comment il est devenu le conquérant qu'il est, et se demande s'il ne s'est pas trop adouci avec le temps.
Une histoire très sympathique pour démarrer le recueil, montrant un Krang typé millénial en rébellion contre l'autorité parental et qui se découvrira une âme de guerrier insoupçonnée.
Je n'ai jamais été un grand fan de l'armure de Krang dans la série de comics actuel. Je n'imaginais absolument pas l'armure classique du dessin animé des années 80 qui n'aurait pas collé à l'univers, mais cette version militaire froide bien que légitime me semblait manquer de personnalité. Cette aventure permet de la voir sous un jour nouveau, et si le design reste sobre l'idée symbolique derrière me la fait apprécier un peu plus ; d'autant qu'à côté on a droit à de petits clins d'œil à la fameuse armure du dessin animé.
Par contre, j'ai oublié quelque chose ou bien on ne nous explique jamais comment les soldats comme Tragg et Granitor sont passés d'une peau jaunâtre classique à une peau de pierre ?
En bref, une bonne histoire de "one brain army" avec un Krang en mode Rambo dans un moment fondateur pour le cerveau rose le plus belliqueux de l'univers.
Les dessins sont très agréables en particulier sur la gestuelle et les expressions de Krang et sa petite chevauchée rendue épique.
Baxter Stockman
Scénario : Erik Burnham / Dessin : Andy Kuhn
Parmi les ennemis des Tortues, il est certainement l'un des plus fourbes de par sa capacité à changer de camp en fonction de là où ses intérêts seront le mieux servis. Un alpha-capitaliste qui sera tout à fait disposé à vous aider dès lors que vous garantirez de pouvoir lui donner plus que les parties adverses.
La micro-série consacrée à Baxter Stockman se situe alors qu'il pilote la construction du Technodrome pour Krang. Il sait que les plans du seigneur de guerre comportent encore plus de zones d'ombres que ce qu'il a déjà pu déceler et va donc faire en sorte d'en découvrir le maximum sur cette technologie qui promet de rendre la Terre invivable pour les humains et donc aussi pour Baxter lui-même.
Couplé à de courts passages de flashback, cette micro-série nous permet de rentrer un peu dans l'esprit du calculateur patron de StockGen, résultat d'une irrépressible envie de gagner additionnée à un fort instinct de conservation.
Une lecture qui surprend en étant un peu triste pour un personnage secondaire que l'on découvre avec plaisir, malheureuse victime des manipulations froides de Stockman.
Pour ce qui est de la partie graphique, comme d'habitude avec Andy Kuhn je lis ça sans déplaisir car les compositions sont efficaces, mais je n'apprécie pas vraiment son trait.
Old Hob
Scénario : Jason Ciaramella / Dessin : Dave Wachter
Ce numéro peut être pleinement considéré comme l'origin story de Hob. On découvre sa vie avant la mutation et les temps qui ont suivi celle-ci.
Un des éléments que j'apprécie le plus quand il s'agit du mutagène c'est de voir les personnages réfléchir sur leur condition de mutant. C'est un point qui n'est pas toujours beaucoup mis en avant mais qui peut donner des réflexions intéressantes comme avec Leatherhead.
Hob est un chat – donc plutôt solitaire – qui a porté sa haine de Splinter à travers sa mutation et qui se tournera naïvement vers les humains dans sa quête de vengeance. On comprend encore un peu mieux d'où lui vient son dégoût des humains et sa volonté de construire sa famille avec les Mutanimaux, et pourquoi il essaie de mettre de côté son antipathie pour la famille des Tortues qui font après tout parti comme lui des rares mutants, et qui ont aussi leurs problèmes avec les humains.
L'une de mes micro-séries préférées du recueil et vraiment un beau travail de Dave Wachter. La transformation de Hob et la découverte de son physique qui s'en suit sont parmi les plus belles des différents chapitres.
Alopex
Scénario : Brian Lynch / Dessin : Sophie Campbell
Alopex c'est toujours un oui ; mais Alopex dessinée par Sophie Campbell ? Et en plus dans un environnement neigeux ? N'en dites pas plus !
La renarde nous a rapidement montrée qu'elle n'était pas à sa place auprès de Shredder et que malgré ses manipulations elle s'en rendrait compte tôt ou tard pour doucement changer de camp.
Ce petit détour très significatif par le lieu de ses origines est un point de basculement majeur dans sa personnalité, de l'allégeance aveugle du départ pendant ce combat où – sûre d'elle comme toujours – elle va jusqu'à se bander les yeux pour défendre l'honneur du clan Foot, à l'ouverture de ceux-ci face au vrai visage de Shredder.
Un excellent arc à la fois rapide et maîtrisé avec parmi les meilleures compositions du recueil, et toujours la douceur de Sophie Campbell dans le dessin des expressions ingénues d'Alopex.
Et puis sérieusement : qui n'aime pas Alopex ?
Karai
Scénario : Erik Burnham / Dessin : Cory Smith
La descendante du clan Saki a été remplacée par une version sombre de Léonardo aux côtés de Shredder. Lors d'une visite dans un centre d'entrainement de soldats Foot elle se remémore comment elle a choisi la voie qui l'a menée à faire renaître son clan et son ancêtre Oroku Saki.
Là aussi on peut considérer l'histoire comme une origin story, avec un retour sur l'enfance de Karai et son entrainement en autodidacte défiant les préceptes de son père et qui aura conduit l'esprit de Shredder à se manifester à elle pour préparer son retour.
Très sympathique récit pour confirmer la détermination de ce personnage qui a besoin de montrer qu'elle est le futur leader naturel des Foot (malheureusement, l'histoire fait aussi un lien avec celle de Bebop & Rocksteady un peu plus loin dans le volume).
Là encore on est sur du très solide graphiquement.
Hun
Scénario : Mike Costa et Ben Epstein / Dessin : Mike Henderson
Il s'agit là peut-être de la micro-série qui me manquait le plus à la lecture de l'histoire principale.
En effet, Hun subit une transformation d'un numéro à l'autre qui m'avait parue totalement improbable, et même une incohérence de taille (littéralement) que j'avais fini par mettre sur le compte d'un manque de direction donnée aux artistes.
En réalité, tout ce qu'il faut savoir pour comprendre ce changement soudain et impressionnant de physique est contenu dans ce numéro.
Son aventure montre les dommages de l'alcool sur le protagoniste, qui même lorsqu'il veut se reprendre en main continue de prendre des mauvaises décisions et à effriter le lien avec son fils qu'il tente pourtant de reconstruire. C'est un peu triste de le voir se faire manipuler, d'autant qu'ici on lui donne une humanité qui n'est pas tant montré que ça dans la série principale, lui ajoutant une face tragique et faisant voir d'un œil nouveau ce qu'il se passe dans les premiers tomes VF (quitte à sonner un peu faux ou "out of character") .
Encore un numéro très correct mais que j'aurai aimé découvrir bien plus tôt, tant les événements autour de celui-ci sont présents mais flous dans ma mémoire.
Comme pour la micro-série sur Krang, mais cette fois dans un contexte urbain, Mike Henderson signe une belle partie graphique, surtout sur le personnage titre qui passe d'un cinquantenaire moyen et fragile et à un colosse au proportions gigantesques et semblant inarrêtable.
Bebop & Rocksteady
Scénario : Ben Bates et Dustin Weaver / Dessin : Ben Bates
« Eh Mec ! Elle est où ma caisse ? », « Beavis & Butt-Head », « Cheech & Chong », « Bill & Ted », …
On a certainement tous nos références de duo de personnages tellement bêtes que même face au plus simple des choix, même mis en face de la solution à leurs problème et quand on leur dit exactement quoi faire, ils arrivent à prendre la décision opposée et à faire n'importe quoi de la pire des manières possibles.
Sauf que bien souvent les situations sont ces personnages sont plutôt gênantes à suivre que réellement drôles.
C'est ce genre d'histoire qu'est la micro-série sur Bebop & Rocksteady, aussi lourde que la réunion du phacochère et du rhinocéros que les deux personnages deviennent après leur mutation montré dans cette aventure.
Mais que ces personnages soient deux balourds bons qu'à tout casser, ça on le savait pertinemment ; le plus gros point faible de cette histoire vient selon moi du personnage de Karai : en les ayant choisi en connaissance de cause (elle ne pouvait pas ne pas les avoir analysé et ne pas savoir), et malgré son "épiphanie" finale, parmi le trio de personnages c'est bien elle qui apparait comme la moins fine et se montre plus comme le bras cassé que le bras droit de Shredder.
Très dispensable, et très en dent de scie sur la partie graphique.
Shredder
Scénario : Dan Duncan et Paul Allor / Dessin : Dan Duncan
Oroku Saki est mort il y a longtemps. Et pendant longtemps il l'est resté. Mais son esprit était-il au repos ?
Une histoire assez particulière, narrée par un Shredder encore secoué parce qu'il a vécu dans son au-delà. C'est un récit empli du mysticisme typique associé à Saki et Yoshi, mais dont on ne sait cependant pas s'il s'agit de la réalité ou juste une création de l'esprit de ce ninja perdu dans le temps pour combler le vide entre sa vie au Japon à l'époque féodale et sa résurrection à New-York.
Quoi qu'il en soit il s'agit pour lui de souvenirs qui mettent pour nous en pleine lumière son égo ; et que ces passages de sa mort aient existés ou non, les choix de Shredder qui en découlent sont bien réels pour ce personnage qui, comme tant d'autres méchants, tente de se saisir plus fermement de son présent pour déjouer le destin qui lui a été prédit...quitte à le précipiter ?
Un bon chapitre pour conclure ce volume, mais pas celui qui restera le plus en mémoire pour ses dessins malgré le dynamisme de quelques planches.
Conclusion :
Difficile de donner un avis global objectif à ce genre de recueil tant il dépendra de votre appréciation de la série.
Si vous n'avez jamais lu la série actuelle, ce comics est clairement à éviter (mais lisez la série est vous pourrez y revenir après ^^).
Si toutefois vous êtes déjà lecteur, il est probable que le livre vous fasse de l'œil et dans ce cas je ne pourrais que vous conseiller de lui laisser sa chance car s'il ne propose pas vraiment de contenu obligatoire pour la compréhension des aventures régulières, les histoires sont globalement qualitatives, généralement jolies à voir, et permettent de mieux comprendre les ennemis en leur donnant un peu de développement supplémentaire.
Fabien.
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